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APRES MOI LE DELUGE
by Samir Raafat

October 2003 issue

CAIRO POPULATION
1838: 270,000
1880: 354,000
1885: 389,710
1906: 854,710
1934: 1,060,000
1948: 2,100,000
1998: 17,000,000

Nous avons tous remarqué que de nombreuses communautés, enfermées dans des complexes très à la mode, accessibles par des autoroutes circulaires, des ponts et des tunnels, ont poussé comme des champignons autour de la ville. Les grosses fortunes ont quitté le centre du Caire et de ses vieilles banlieues pour de nouvelles enclaves plus chères, implantées en plein désert, où l'architecture va du style néo-californien au faux Louis Baragan, en passant par Disneyland et le mont Olympe ! Il semble que le centre-ville soit désormais abandonné pour des agglomérations déjà en état de délabrement avancé pour certaines. Les habitants fuient tous la ville pour les modernes condominiums, à l'exemple de la nouvelle bourgeoisie cairote des années 1920 et 1930 qui quitta Choubra, Helmia, Abbassia et Mounira pour Héliopolis, Maadi, Zamalek et Giza, laissant derrière elle les miettes d'un passé vite oublié !

Et pourtant, malgré la décadence actuelle, la surpopulation et la planification laissée au pur hasard, Le Caire moderne a été, à un certain moment, une ville à l'architecture exceptionnelle. La période qui s'étend du XIXe siècle jusqu'aux années 1950 a été témoin d'une architecture florissante aux styles variés : baroque, néo-classique, art nouveau, art déco, rococo khédivial, colonial, Renaissance italienne, mauresque et néo-pharaonique. Le tout produisait un éventail d'immeubles élégants.

La plus grande partie du centre-ville a été construite à une époque où la société était riche et avait le sens de la proportion. Epoque aussi où l'Egypte, étroitement liée à l'économie mondiale, était ouverte aux influences extérieures. Les architectes partaient étudier en Occident où ils découvraient le Paris d'Haussmann et, plus tard, l'avant-garde d'un Le Corbusier ou d'un Frank Lloyd Wright. Bien décidés à retranscrire dans la pierre cairote ce qu'ils avaient vu ailleurs, ils étaient aussi résolus à y apposer leur propre griffe, tant pour enrichir le paysage urbain que pour créer une sorte de répertoire à l'usage des architectes locaux.

Et depuis ? Deux décades de socialisme mal dirigé et une législation défectueuse régissant l'habitat et le contrôle de la location ont dévasté plus que le « Samedi Noir », ce jour du 26 janvier 1952 où la plupart du centre du Caire a disparu dans les flammes. Les tentatives du nouveau régime révolutionnaire pour créer une société plus égalitaire ont vu la séquestration et la confiscation de ce qui était considéré comme « les propriétés de l'élite ». Les nouveaux apparatchiks purent, par simple décret, mettre la main sur des appartements hâtivement éva-cués par les précédents capitaines et rois de l'industrie égyp-tienne défunte. La plupart de ces immeubles passèrent aux mains de sociétés d'assurances gouvernementales n'ayant aucune connaissance de l'immobilier et des faveurs quoti-diennes étaient accordées aux partisans les plus en vue du régime. De nombreuses propriétés ont servi à des fins auxquelles elles n'étaient pas destinées : luxueuses villas transformées en écoles surpeuplées et insuffisamment financées, blocs d'appartements devenus des bureaux du secteur public, etc. Ces majestueuses demeures ont vu peu à peu leurs plafonds, délicatement peints, zebrés par d'affreux néons et leurs boi-series disparaître sous des miroirs sans style. Bacs à fleurs, fontaines de marbre, boîtes à lettres en chêne ont été laissés à l'abandon et leurs nouveaux habitants s'enfermèrent dans la xénophobie. Le résultat final des lois de location imposées à cette époque est qu'aujourd'hui le loyer mensuel d'un appartement luxueux de quatre chambres à Zamalek est considérablement inférieur à celui d'une masure dans l'un de ces bidonvilles qui encerclent Le Caire.

Une autre cause de l'abandon du patrimoine est certainement le manque d'éducation et d'appréciation du riche passé architectural de la ville. Jusqu'à très récemment, tout ce qui était associé à l'ancien régime n'était pas bien vu. Dernièrement, j'ai demandé à un diplomate posté dans une capitale occidentale le nom du palais dans lequel s'est installé le ministère des Affaires étrangères. Il ne le savait pas et s'en souciait fort peu. Un groupe de jeunes écolières jouait sur le terrain d'une magnifique villa en face de l'hôtel Sémiramis. Je leur ai demandé qui était le martyr Ali Abdel Latif dont le nom est maintenant inscrit sur l'immeuble. « Tout ce que nous savons, c'est que notre école porte son nom », ont-elles répondu en choeur avant de s'enfuir. Ce manque d'éducation et de connaissance de l'histoire d'une société est dangereuse, mais quand elle s'accompagne d'un manque de fierté civile, cela devient alarmant. Personne ne sait et personne ne se soucie. Le mot "entretien" a pris le même chemin que celui de "tarbouche".

Durant l'époque de "l'ouverture", il y a eu une abondance de richesse qui a fait une armée de millionnaires. Viennent ensuite : les docteurs aux rémunérations élevées, les banquiers et les avocats dont le travail consiste à garder les nouveaux riches en bonne santé, influents et hors de prison.


Journaliste et historien, Samir Raafat a créé le site egy.com qui réunit informations, historiques, documents d'époque et photos sur les monuments les plus remarquables du Caire du XIXe et du XXe siècle. Il a publié Maadi 1904-1962 (Palm Press) et publiera prochainement Cairo: The Glory Years (Harpocrates Pub., Alexandrie).


articles posted on egy.com were published in the following books by Samir W Raafat: THE EGYPTIAN BOURSE, Zeitouna, Cairo -- CAIRO THE GLORY YEARS, Harpocrates, Alexandria -- HISTORY & SOCIETY IN A CAIRO SUBURB; MAADI 1904-1962, Palm Press, Cairo -- PRIVILEGED FOR THREE CENTURIES, printed digitally and bound by Elias Printing, Egypt

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